Dimanche 7 mai 1967… Je viens d’avoir dix-neuf ans et vais assister à mon premier Grand Prix de Monaco. Depuis une semaine, mon cœur bat à la cadence des accélérations des huit, douze et seize cylindres ; ma respiration est rythmée par les changements de vitesses des Formules 1 qui ont investi la Principauté… Elles sont ici chez elles, filles adoptives bien-aimées de la ville qui vibre toute entière pour elles et leurs pilotes.

Sur la place du Casino, la grande aiguille sur la grande horloge, en façade de l’élégante bâtisse, est presque à la verticale. 15 heures. Le silence, soudain, s’est fait. J’attends, la gorge sèche. Du port monte un sourd grondement, comme une menace qui s’amplifie bientôt, et donne naissance à une suite de plaintes suraigües, plus distinctes… ‘’Elles’’ sont dans la montée du Beau-Rivage ! Leur clameur m’assaille avant qu’elles n’apparaissent, comme catapultées, au coin de l’Hôtel de Paris : une rouge devant une verte au nez doré, Lorenzo devant Jack, qui déjà, l’attaque, suivis de la horde sauvage qui plonge en hurlant dans le goulet vers le Tip-Top, à deux pas de moi…

Je les vois, je les entends, je sens leur souffle, je les renifle encore… Cinquante ans, c’était hier…